Home 9 Bien-être 9 Boiteries chez le cheval : à quoi peuvent-elles être liées ?

La boiterie chez le cheval se caractérise par une douleur de l’appareil locomoteur. Visuellement, lors des déplacements, le transfert du poids du corps ne semble pas régulier. Autrement dit, ses mouvements sont asymétriques. Si cette pathologie est fréquente chez les chevaux, elle n’en reste pas moins difficile à diagnostiquer, puisque sa source peut être localisée sur un ou plusieurs membres, mais également au niveau du dos ou de l’encolure du cheval. 

La détection d’une asymétrie pathologique à son stade le moins avancé constitue l’un des enjeux de la pratique vétérinaire. Cela permet, entre autre, d’optimiser la réussite de la guérison grâce à la mise en place d’un traitement adapté. 

Mais à quoi les asymétries peuvent-elles être liées ? Certaines boiteries sont-elles plus communes aux membres antérieurs ? Ou bien postérieurs ? Et comment les identifier concrètement ?

Les différents types de boiteries

Chez le cheval, les asymétries locomotrices – pathologiques – sont des lésions qui peuvent être liées à deux niveaux : ostéo-articulaires et/ou ligamentaires et tendineuses. Il existe plusieurs types de boiteries équines : 

Les boiteries liées aux abcès

Celles-ci sont assez communes et proviennent de la pénétration d’un corps étranger qui aboutit à un abcès. L’abcès est difficilement détectable, c’est pour cela que le diagnostic a souvent lieu lorsque l’asymétrie locomotrice est visuellement perceptible. Lors de l’intervention vétérinaire, l’abcès est percé puis un pansement est réalisé afin d’aider au drainage du pus et protéger la plaie. Cette intervention ne laisse généralement pas de séquelles à long terme.

Les boiteries liées à la fourbure

La fourbure est une inflammation de la lamina. Chez un cheval, si la majeure partie du poids repose sur les membres antérieurs, les chevaux atteints de fourbure sont plus susceptibles de déplacer leur poids vers l’arrière afin de soulager le stress de la jambe avant, qui est souvent la plus touchée. La boiterie est souvent sévère et le cheval a de grandes difficultés à se déplacer.

Les boiteries liées au syndrome naviculaire

La boiterie est généralement chronique et souvent accompagnée de douleurs qui proviennent de l’os naviculaire et des structures voisines. Les chevaux commencent généralement à boiter entre 7 et 9 ans, mais cela peut varier. Ils ont souvent des foulées assez courtes et l’asymétrie s’intensifie sur sol dur.

Les boiteries liées à des blessures tendineuses ou ligamentaires

Elles tiennent leurs noms de leur origine : chacun des membres du cheval se compose de nombreux tendons et ligaments importants. La boiterie est alors causée par une inflammation et/ou par une rupture partielle ou totale des tendons. Lorsque le tendon est touché, on parle de tendinite. Si la boiterie est causée par une inflammation d’un ligament, on parlera alors de desmite. Cependant, les boiteries tendineuses ou ligamentaires peuvent aussi être la conséquence d’une plaie mal soignée : une infection au niveau de la gaine, la ténosynovite septique, ou encore suite à un traumatisme.

Les boiteries liées à l’arthrose

L’arthrose est une maladie articulaire dégénérative caractérisée par la dégradation de l’articulation. Elle est, dans certains cas, le résultat d’une usure articulaire normale liée à l’âge, mais peut également être associée à une usure prématurée des articulations, dû à un travail trop intensif par exemple. La boiterie est alors causée par une douleur au niveau de l’articulation ainsi que par des changements structurels liés à la destruction du cartilage et au remodelage osseux.

Zoom sur les boiteries communes

La boiterie fait partie des pathologies complexes à diagnostiquer chez le cheval, cette dernière pouvant trouver son origine dans de multiples sites anatomiques, et pouvant être la conséquences de nombreux facteurs. Cependant, certaines boiteries sont plus communes aux membres antérieurs – et d’autres aux postérieurs. Cette partie regroupe une simple liste des boiteries les plus communes chez le cheval, en fonction des différents membres.

Boiteries des membres antérieurs

Atrophie des muscles supra-épineux et infra-épineux (sweeny) – Inflammation de la bourse séreuse du biceps brachial (brucine bicipitale) – Arthrite de l’épaule (arthrite scapulo-humérale) – Paralysie du nerf radial – Fracture de l’ulna – Rupture du ligament collatéral médial de l’articulation huméro-radial – Hygroma du coude – Déviation du genou vers l’avant (cheval archi ou brassicourt) – Déviation des genoux dans le plan latéro-médial chez le poulain – Hygroma du genou – Arthrite traumatique du genou – Fracture intra-articulaires des os du carpe – Fracture de l’os carpien accessoire – Rupture de l’extenseur radial du carpe – Contracture des tendons fléchisseurs du doigts – Tendinite, ténosynovite – Périoste du canon – Suros – Fracture d’un métacarpien rudimentaire – Desmite du ligament suspenseur du boulet – Boiteries relatives à l’origine du LSB – Fractures longitudinales articulaires de l’os métacarpien principale au niveau de l’articulation du boulet – Déviation de l’articulation métacarpo-phalangienne – Fracture des os sépaloïdes proximaux – Sésamoïdite – Fractures en copeau de l’extrémité proximate de la première phalange au sein de l’articulation du boulet – Arthrite traumatique de l’articulation métacarpo-phalangienne – Desmite des ligaments sésamoïdiens distaux – Formes phalangiennes – Ostéite du processus extensorius (éminence pyramidale) de la troisième phalange – Fracture du processus extensorius (éminence pyramidale) de la troisième phalange – Javart cartilagineux – Formes cartilagineuses – Fourbure – Maladie naviculaire (podotrochléite) – Fracture de l’os sésamoïde distal – Fractures de la troisième phalange – Ostéite du pied – Plaies pénétrantes de la sole – Bleimes en talon et contusions de la sole

Boiteries des membres postérieurs

Myopathies liées à l’exercice – Myosite des muscles psoas et longissimus – Chevauchement des processus épineux thoraciques et/ou lombaires – Subluxation sacro-iliaque – Fractures du bassin – Thrombose de l’aorte caudale ou des artères iliaques – Luxation de la hanche – Rupture du ligament de la tête fémorale -Rupture du ligament de la tête fémorale – Bursite trochantérique – La paralysie du nerf fémoral – L’accrochement de la rotule – Chondromalacie de la rotule – Les boiteries du grasset – Ostéochondrose de la tubérosité tibiale – Fracture de la fibula – Rupture du muscle troisième péronier – Rupture de la corde du jarret – Rupture du tendon du muscle gastrocnémien – Myopathie fibreuse et myopathie ossifiante – Harper – Shivering – Éparvin osseux – Éparvin mou – Éparvin veineux – Éparvin occulte – Fractures en copeaux de l’os tibial du tarse – Cession – Inflammation de la branche de la bourse cunéennes – Garde – Capelet – Laxité des tendons fléchisseurs chez le foal – Hyperextension digitale chez le foal – Crapaud 

Boiteries communes aux antérieurs et aux postérieurs

Syndrome de Wobbler – Dystrophie musculaire – Section accidentelle des tendons extenseurs des phalanges – Section accidentelle des tendons fléchisseurs – Molettes – Constriction du ligament annulaire du boulet – Fractures longitudinales et fractures comminutive de la première phalange – Fractures de la deuxième phalange – Formes du au rachitisme – Seines en pince, en quartier et en talon – Plaies pénétrantes de la ligne blanche – Pourriture de la fourchette – Plaies

Identifier la boiterie : l’examen locomoteur

Pour diagnostiquer une boiterie, un vétérinaire doit avoir des compétences cliniques et d’observation aiguisées. Il est essentiel d’examiner cliniquement le cheval, et cet examen se fait en deux parties : un examen statique, suivi d’un examen dynamique.

L’évaluation commence par une anamnèse détaillée et un examen physique approfondi. L’examen statique permet d’évaluer de manière visuelle la conformation et la posture du cheval. Durant celui-ci le vétérinaire peut pratiquer des tests des pieds avec une pince dans le but de déceler une éventuelle sensibilité qui pourrait être liée à une maladie naviculaire, des tests d’extensions et de flexions ou encore une palpation des vertèbres afin de trouver une éventuelle douleur ou chaleur.

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Ensuite, on procède à une évaluation des allures du cheval en mouvement. Les chevaux boiteux ont un mouvement asymétrique du corps dû à un déplacement inconscient du poids du corps. La reconnaissance du hochement de tête et de l’inclinaison du bassin qui en résulte est la base du diagnostic de la boiterie. Les principaux critères d’évaluation visuelle et objective des boiteries sont les asymétries du mouvement de la tête pour les boiteries des membres antérieurs et les asymétries du mouvement du bassin pour les boiteries des membres postérieurs (Kramer and al. 2004)

Lors de l’examen dynamique, l’identification de la boiterie est améliorée par les mouvements circulaires et les flexions des membres. Cet examen est généralement réalisé au trot : la locomotion du cheval est évaluée sur différents sols, en ligne droite et sur cercle. Il permet d’avoir une première vision globale de la locomotion du cheval, et peut ensuite indiquer les sites à investiguer plus précisément, avec des radiographies, des échographies ou divers types d’examens. Enfin, une anesthésie diagnostique peut être également réalisée pour supporter le diagnostic des asymétries complexes, afin de confirmer le site exact de la lésion.

Chez les chevaux souffrant d’une boiterie primaire des membres postérieurs, le hochement de tête compensatoire est le plus important. Cette asymétrie du mouvement compensatoire de la tête peut facilement être interprétée à tort comme une boiterie primaire du membre antérieur ipsilatéral (Kelmer and al, 2005).

Selon l’étude de Rhodin réalisée en 2017, les chevaux souffrant d’une boiterie induite des membres postérieurs et présentant une asymétrie de mouvement compensatoire de la tête présentaient des asymétries de mouvement de la tête et du garrot indiquant une boiterie dans les différents membres antérieurs. 

La symétrie du mouvement du garrot peut donc être utilisée pour distinguer un hochement de tête associé à une véritable boiterie des membres antérieurs, d’une asymétrie compensatoire du mouvement de la tête causée par une asymétrie postérieure. La quantification de la symétrie du garrot peut donc aider à localiser la boiterie primaire, qu’elle soit antérieure ou postérieure.

Il est également possible, et de plus en plus courant, de réaliser un examen locomoteur monté, aux 3 allures. Cette méthode permet une évaluation complète du système locomoteur du cheval. En étant monitoré avec une technologie vétérinaire, cet examen permet une analyse 360° de la santé du cheval.

Conclusion

Bien que la boiterie soit une pathologie fréquente chez le cheval, sa complexité la rend difficilement diagnosticable. La distinction entre asymétries compensatoires et asymétries de mouvement primaires directement liées à la douleur est donc une condition préalable à l’évaluation réussie de la boiterie. 

En effet, alors qu’une boiterie peut être causée par deux types de lésions différentes, elle peut être la conséquence de nombreux facteurs qui, selon leur gravité, auront des conséquences à plus ou moins long terme. Par exemple, le sol a un impact non négligeable sur la locomotion du cheval, qu’il soit sain ou boiteux. Il est donc important de suivre une asymétrie locomotrice le plus tôt possible lors de son apparition. Les outils de quantification de la locomotion sont d’excellents supports d’aide au diagnostic ou au suivi longitudinal des chevaux ! 

SOURCES :
Rhodin, M., Persson-Sjodin, E., Egenvall, A., Serra Bragança, F.M., Pfau, T., Roepstorff, L., Weishaupt, M.A., Thomsen, M.H., van Weeren, P.R. and Hernlund, E. (2018). Vertical movement symmetry of the withers in horses with induced forelimb and hindlimb lameness at trot. Equine Veterinary Journal, 50(6), pp.818–824. doi:10.1111/evj.12844.
‌Weishaupt, M.A. (2008). Adaptation Strategies of Horses with Lameness. Veterinary Clinics of North America: Equine Practice, 24(1), pp.79–100. doi:10.1016/j.cveq.2007.11.010.

Mots-clés: locomotion équine, asymétrie locomotrice, boiterie, diagnostic vétérinaire, outil de quantification, physiologie équine, EnvA, CIRALE